Entre reflux des taux d’intérêt, ralentissement de l’inflation et stabilisation des prix des logements, les ménages français retrouvent du pouvoir d’achat immobilier. L’embellie sur le front des prêts à l’habitat se poursuit en ce début d’année.
Aux premières lueurs de 2025, les candidats à l’accession à la propriété, qui empruntent pour financer leur projet immobilier, ont de quoi se frotter les mains. Plusieurs signaux attestent de la poursuite de l’embellie sur le front du crédit. Celle-ci a débuté depuis plus d’un an, contribuant à soutenir l’activité du marché résidentiel tricolore. C’est même, dans un paysage toujours sombre pour le logement, le principal facteur du rebond de la demande d’achats des ménages.
Ainsi, tout au long de 2024, alors que la Banque centrale européenne (BCE) a assoupli sa politique monétaire, le recul des taux d’intérêt moyens des prêts à l’habitat s’est accentué mois après mois. Ils sont passés d’un pic de 4,20 % (hors assurance et autres garanties), en décembre 2023, à 3,37 %, en novembre, d’après l’Observatoire du Crédit Logement/CSA.
Contrairement à ce que l’on pouvait craindre au début de l’été, ni le choc de la dissolution, ni la persistance des incertitudes politico-économiques, n’ont réussi à contrecarrer l’amélioration des conditions d’emprunt.
Depuis l’automne, le recul des taux des prêts à l’habitat s’est même accéléré, tandis que les banques maintenaient la concurrence sur ce produit phare. En 2025, cette tendance favorable aux emprunteurs pourrait continuer.
Les taux continuent de baisser
Début janvier, les taux des prêts au logement continuent de décroître constatent plusieurs courtiers au vu des récents barèmes de leurs banques partenaires. Par exemple, Vousfinancer note que la moitié des grilles de taux reçus de la part des établissements financiers sont en baisse, quand l’autre moitié affiche des taux stables. Les diminutions s’établissent, en moyenne, à 0,10 point, sauf dans deux banques qui ont procédé à un recul de 0,15 point. Dès lors, par l’intermédiaire de spécialiste du courtage, les taux moyens en janvier s’affichent à 3,10 % sur 15 ans, 3,30 % sur 20 ans et 3,2 % sur 25 ans.

De même, souligne Fabienne Laborde, directrice des opérations de Le-Partenaire.fr & Eloa.io, « en cette nouvelle année 2025, l’hiver est là avec des températures basses comme la plupart des taux des crédits immobiliers dont on observe une diminution pour tous types d’emprunteurs. » Au niveau national, dans ce réseau, les candidats au crédit peuvent obtenir un prêt à partir de 2,68 % sur 10 ans et jusqu’à 3,54 % sur 25 ans.
Ce crédit meilleur marché a été favorisé par la baisse du taux auquel les établissements financiers eux-mêmes se refinancent auprès de la BCE. Pour rappel, l’institution a procédé à plusieurs diminutions successives de ses taux directeurs en 2024. Jugeant que l’inflation était sous contrôle, elle a commencé en juin en les réduisant d’un quart de point. Il s’agissait alors du premier assouplissement de sa politique monétaire depuis 2019. La dernière et quatrième baisse de 2024, est intervenu le 12 décembre 2024.
Dans ce contexte, retrouvant des marges sur le crédit immobilier, produit phare de la conquête de clients, les banques accordent plus largement des prêts. La production atteint, hors renégociations, 10,4 milliards d’euros en octobre, selon les derniers chiffres de la Banque de France, loin du plus bas de mars 2024 à 6,9 milliards d’euros.
Les banques toujours à l’offensive
Le début d’année confirme la propension des établissements à prêter davantage. « Le premier trimestre représente une période stratégique pour les banques dans la réalisation de leurs objectifs commerciaux annuels », explique Nassima Khiari, responsable des relations bancaires du groupe Empruntis. Elles se montrent « particulièrement réceptives aux demandes de prêts, multipliant les offres attractives pour capter de nouveaux clients. » Il s’agit aussi, complète Sandrine Allonier, porte-parole du courtier Vousfinancer, « de rattraper un premier semestre 2024 qui avait été très mauvais sur ce plan. »
La tourmente politique, depuis la chute du gouvernement de Michel Barnier le 4 décembre, suivie de la nomination de François Bayrou le 13 décembre, ne remet pas, pour l’heure, en cause cette dynamique. « Nous avons reçu les premiers barèmes de taux plus tôt que d’habitude, dès la fin décembre, contre souvent vers le 10 janvier les années précédentes », remarque Julie Bachet, directrice générale de Vousfinancer. Ce qui témoigne selon elle, d’une « stratégie commerciale des banques bien définie et dans la lignée de 2024 : conquérir de nouveaux clients via le crédit immobilier. »
Autre indicateur au vert, de nombreux établissements ont prolongé au premier semestre 2025 des offres de prêts à taux bonifiés, qui devaient prendre fin au 31 décembre 2024. Certaines sont dédiées à l’achat d’un bien performant énergétiquement ou qui va le devenir grâce à des travaux. Une aide bancaire d’autant plus appréciable que l’élargissement du prêt à taux zéro (PTZ), prévu dans le budget 2025, a, du fait de la censure du gouvernement Barnier, été reporté sine die.
Vousfinancer précise que des banques octroient aux primo-accédants, non éligibles au PTZ, des prêts à des taux compris entre 0 et 2 %, à condition que le montant ne dépasse pas 10 % du prêt principal et dans la limite de 30.000 euros.
Le seuil psychologique des 3 % au printemps
L’inflation continue de ralentir en France (1,3 % en décembre 2024, sur un an, selon l’Insee) et reste contenue dans la zone euro. Dans ce contexte, Christine Lagarde, la présidente de la BCE, a laissé entendre en décembre qu’elle continuerait à réduire ses taux d’intérêt cette année. Ce qui s’annonce favorable pour le crédit immobilier tricolore.
« La poursuite de cette politique monétaire accommodante, couplée à l’envie des banques de capter une clientèle plus jeune, des primo-accédants, et d’élargir le spectre des emprunteurs, va contribuer à rendre les conditions du crédit encore plus attrayantes dans les prochains mois », estime Sandrine Allonier. Les taux moyens pourraient, selon elle, s’approcher des 3 % au printemps. Autrement dit, des prêts en deçà des 3 % sur 20 ans et plus vont être accordés à de plus en plus d’emprunteurs.
Certes, les répercussions de la crise institutionnelle française sont visibles sur les conditions de financement de l’Etat français qui se renchérissent. Ainsi, l’OAT (obligations assimilables du Trésor) 10 ans – le taux auquel l’Etat emprunte à 10 ans – est remonté à 3,3 % le 8 janvier 2025, après 3,2 % le 30 décembre 2024 et seulement 2,6 % fin 2023. Une dégradation qui n’a pour l’instant pas eu d’impact sur les taux immobiliers.
Mais, tempère Pierre de Buhren, directeur général Groupe Empruntis, « les Français ne pourront durablement s’endetter moins cher que l’Etat français. » Sans une nette amélioration du climat politique et économique, le passage des taux moyens immobiliers sous le seuil psychologique des 3 %, pour atteindre 2 % d’ici à la fin de l’année, paraît peu probable.
